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L’École en commun - France en commun

Sortons de l'école inclusive pour passer à l'école émancipatrice

Aujourd’hui, plus de 320 000 E.S.H. (Élèves en Situation de Handicap) sont scolarisés en milieu ordinaire. Le manque de moyens attribués à la gestion des dossiers, ne permet aucune évaluation sérieuse des besoins réels de l’élève et des capacités de l’école à y répondre. Les parents d'élèves et les professeurs sont exclus des concertations. Le bilan est catastrophique.

Une réalité est volontairement occultée par le ministère pour diverses raisons comptables. D’un côté, des économies budgétaires sont réalisées sur le dos de l’école où le coût de la scolarité (6 300 €/ an / élève en primaire) est 6 à 11 fois moins élevé qu’en institut spécialisé (entre 39 000€ et 72 000€/an/élève) de l’autre, l’obtention rapide d’une place à l’école permet d’éviter les années d’attente, très impopulaires, sur les listes des Instituts (1 à 10 ans)

Cette absence de diagnostic ne permet pas au le législateur de régulation en cas de problème.

Ainsi, les premières victimes du fonctionnement absurde de cette école inclusive, sont les enfants en situation de handicap et en particulier ceux issus du "champ mental". La réorganisation qui a découlé de cette loi a eu comme principale conséquence de les sortir des institutions médico-sociales et hospitalières pour leur faire intégrer leur école de quartier et les classes d’ULIS (Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire) ou à défaut les classes ordinaires. Souveraines, les familles peuvent exiger la scolarisation de leur enfant en classe ordinaire malgré les préconisations d’orientation en classe spécialisée et en dépit de l’existence d’une ULIS dans l’école. Censée favoriser la socialisation et l’apprentissage, l’inclusion dans un milieu qui n’est pas adapté a plutôt engendré un mal-être important chez ces derniers, mais également des répercussions négatives sur le climat scolaire des classes d’accueil et un épuisement des enseignants et des A.E.S.H (Accompagnant d’Élève en Situation de Handicap).

Bien évidemment, les inclusions heureuses existent et tout doit être fait pour les accompagner mais pour les mal-heureuses, a-t-on le droit de prolonger la souffrance de certains enfants ? Le mal-être des élèves et la souffrance des enseignants qui pour certains ne peuvent plus s'occuper des élèves ordinaires nivellement l'enseignant par le bas.

N’est-il pas légitime de s’interroger aussi sur l’impact d’une inclusion inappropriée sur les élèves ordinaires ?

Aujourd’hui, ce sont les écoles publiques et en particulier le primaire qui accueillent 80% des élèves E.S.H. à plein temps dont la moitié souffre de problèmes mentaux. Malgré l’augmentation exponentielle (80% en 9 ans) des inclusions, aucune réduction d’effectifs n’a été envisagée dans les classes d’accueil contrairement à ce qui a été accordé en REP (anciennement ZEP) pour les CP à 12. Leur présence ne ralentit pas non plus les fermetures de classe. Ils se retrouvent dès lors au sein de groupes surchargés, aux besoins déjà variés auxquels s’ajoutent les leurs.

Plusieurs enquêtes menées auprès des E.S.H dévoilent sans grande surprise, leur mal-être en classe ordinaire et une meilleure estime d’eux-mêmes dans les classes spécialisées, plus adaptées à leurs besoins spécifiques.

Cet état des lieux négatif de l’inclusion, est le résultat de politiques éducatives de plus en plus clientélistes, d’une absence d’évaluation des besoins des E.S.H. et des conditions réelles de leur scolarisation. En conséquence, l’école est contrainte d’accueillir des enfants dont elle ne reçoit parfois pour seule information que leur numéro de notification attribué par la MDPH (Maison Départementale Du Handicap) sans connaître leur pathologie. Impuissante, elle se retrouve également prisonnière du déni de certains parents qui repoussent le début du diagnostic et par conséquent de la prise en charge. C’est majoritairement à partir du CP que seraient effectuées la plupart des évaluations, laissant ainsi s’installer des comportements dysfonctionnels et de mauvaises habitudes difficilement récupérables.

Sourde et aveugle à ces dysfonctionnements, la Grande Concertation Nationale persiste pourtant à favoriser "les attendus des familles" au détriment de ceux de l’école et les préconisations qui en sont issues vont dans le sens d’une aggravation du climat scolaire.

En conséquence, la gestion purement administrative des E.S.H. et les inclusions de droit sont renforcées grâce à un document unique vendu comme un "plan de scolarisation". C'est la réponse à des besoins non évalués et les adaptations pédagogiques sans analyse de la capacité de l’école à y répondre.

Le transfert théorique des moyens du médico-social vers l’école chargera les équipes enseignantes de toutes les applications pratiques. La coopération indispensable entre ces différents professionnels ne bénéficiera d’aucun aménagement d’horaire ni de remplacement des enseignants lors des réunions empiétant ainsi sur le temps accordé aux élèves ordinaires. La disparition programmée des directeurs d’école et les nombreuses missions qui leur incombaient seront également à la charge des enseignants. Désormais, ils porteront la responsabilité de rédiger le fameux PPS (Plan Personnalisé de Scolarisation) que les services des M.D.P. H débordés ont été incapables de fournir jusqu’à présent. Rappelons enfin que les enseignants n’ont toujours pas accès aux données de santé de l’élève, ce qui revient à prescrire un traitement à un patient dont on ignore la maladie.

En guise de "perspectives d’avenir attrayantes", les AESH indispensables à l’inclusion des cas les plus lourds, déjà peu formées et sous-payées, seront mutualisées pour s’occuper de plusieurs enfants, dans différentes classes et divers établissements.

Cyniquement, le leurre de la formation dématérialisée avec consulting et e-learning est de nouveau utilisé pour masquer l’abandon des enseignants face à des missions toujours plus lourdes et compliquées. D’une part, ce ne sera que depuis leur bureau que les PIAL (Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés) et les enseignants référents, seuls personnels réellement formés à la prise en charge des E.S.H., superviseront les inclusions. D’autre part, la technologie et divers guides 2.0 seront supposés compenser le manque de formation et de temps d’échange des équipes éducatives. Ainsi, Sophie Cluzel assure béate que "la plateforme de ressources numériques sera suffisante pour leur donner les clés de lecture pour les adaptations".

Sous prétexte d’éviter les ruptures de parcours dont sont victimes les E.S.H., le gouvernement pousse l’irrationnel jusqu’à "transformer progressivement les établissements médico-sociaux en plateformes de services, ce qui revient purement et simplement à les supprimer. Bien qu’imparfaits, ils étaient les seuls en mesure d’accueillir dignement les cas les plus complexes. Plusieurs de ces structures ont d’ores et déjà annoncé aux parents désemparés de leurs pensionnaires, la fermeture de leur internat pour la prochaine rentrée scolaire. Aucun temps n’est donc laissé aux communes pour financer et réaliser l’aménagement des écoles en salles de soin et de rééducation à la hauteur des besoins.

L’école publique qui hérite de la majorité des inclusions récupérant les cas les plus difficiles que les établissements privés et même les instituts spécialisés se paient le luxe de refuser.

Imaginer le choix de parents qui doivent laisser leur enfants à côté d'enfants avec des troubles psychiatrique très grave. Leur choix sera de privilégier une école primaire non inclusive dans le privé. Le drame de Périgueux en 2015 dans une école privée inclusive a marqué nombre de parents qui ont vu que leur futurs enfants pourrait être en classe avec un autre enfant avec un trouble psychotique qu'aucun professeur classique ne pourrait géré.

Prolongeant ainsi le désastre de décennies de réformes déconnectées, les politiques et les acteurs « associés » de l’inclusion, se font les complices de la destruction programmée de l’école. L’échec cuisant de ce service public permettra certainement d’ouvrir les portes d’une privatisation mettant ainsi sur le marché, la gestion du premier budget de l’État.

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